Le musée génocide Tuol Sleng S21 à Phnom Penh
- Mis à jour le 26 Jul, 2024 Par: Rivière
Visite poignante mais incontournable lors de votre séjour à Phnom Penh, le Musée du Génocide de Tuol Sleng est le site commémoratif du centre de détention et d’interrogatoire S21. En exposant les preuves d’une période tragique de l’histoire cambodgienne, le musée tente d’encourager les visiteurs à être des messagers de la paix.
Histoire de la prison S21
Lors du génocide khmer rouge entre 1975 et 1979, les bâtiments de l’ancien lycée Toul Svay Prey construit sous le Protectorat français furent reconvertis en un atroce centre de détention et d’extermination. La reconversion du lycée en prison débuta en 1975 après la chute de Phnom Penh et la prise du pouvoir par les khmers rouges. Les geôliers installèrent des barbelés sur chacune des fenêtres de chaque bâtiment de trois niveaux chacun formant un U autour d'une cour. Cela pour empêcher les prisonniers désespérés de se suicider en se jetant dans le vide. Les anciennes salles de classe servirent alors de salle de torture et de cellules collectives dans lesquelles des dizaines de détenus étaient enfermés dans des conditions inhumaines. Ils étaient entassés, allongées par terre avec les pieds attachés à de longues barres de fer par des anneaux en fonte. D'autres détenus étaient enfermés dans des cellules individuelles d’à peine 2m2. La prison S21 constituait le noyau central d’un vaste système de prisons éparpillées dans tout le pays, près de 200, et elle a été utilisée par les khmers rouges comme établissement pour la détention, l’interrogatoire, la torture et l’exécution de ceux qui étaient considérés comme les “ennemis politiques” du régime. De 1975 à 1979, au moins 18 000 hommes, femmes et enfants provenant de toutes les régions du Cambodge ont été torturés et exécutés à S21 dirigé par Douch. Douze seulement ont survécu à l'horreur.
La population carcérale se composait des membres de l'administration et des forces armées du régime de Lon Nol, des membres khmers rouges, considérés comme des traîtres, mais également des civils, des étudiants, des intellectuels, des Cambodgiens revenus de leur exil à l'étranger, des moines bouddhistes, ainsi que quelques étrangers dont quatre Français.
Des conditions de détention extrêmes
Le règlement mis en place par l'administration était drastique. Des règles strictes qui niaient toute humanité à leurs victimes. A leur arrivée à la prison, les prisonniers étaient déshabillés, photographiés et devaient fournir des biographies détaillées, depuis leur enfance jusqu’à la date de leur arrestation. Les détenus étaient ensuite enfermés dans des cellules individuelles où ils étaient enchaînés au sol, ou dans les grandes cellules collectives où ils étaient entravés ensemble avec une série de barres de fer. Les conditions d’hygiène déplorables et la surpopulation carcérale entraînaient la prolifération de poux et de maladies graves. Mais il était absolument interdit de se plaindre et même à pousser des cris de douleur lors des flagellations. Les gardes fouillaient tous les jours les prisonniers afin qu’ils ne puissent pas cacher des objets qu’ils auraient pu utiliser pour se suicider.
Les interrogatoires étaient très souvent suivis de séances de torture. Les interrogateurs demandaient aux détenus torturés d'avouer des fautes qu'ils n'avaient pas commises. Si les interrogateurs n’étaient pas satisfaits des réponses données par le prisonnier, celui-ci était de nouveau torturé jusqu'à ce qu'il fasse des confessions jugées acceptables.
Leur confession faite, le prisonnier était listé pour être exécuté à proximité de la prison puis plus tard, aux champs d’extermination de Choeung Ek, à la sortie de Phnom Penh. Ce système kafkaïen de la torture a duré pendant quatre ans.
Chute du régime khmer rouge
A la chute du régime khmer rouge le 7 janvier 1979, les troupes vietnamiennes et cambodgiennes ont trouvé quelques corps sans vie et en voie de décomposition sur des sommiers. Passé le choc initial qu’a constitué la découverte de cette machine de mort, l’ampleur des archives retrouvées sur place a été une stupéfaction.
De la prison au musée : construction d’une mémoire
Lorsque la ville tomba au début de l’année 1979, le chef de la prison, Douch, parvint à prendre la fuite après avoir ordonné la liquidation de tous les détenus. Mais il n’a pas eu le temps de détruire l’ensemble des archives restées dans la prison, lesquelles servent aujourd’hui à prouver les atrocités commises sur les lieux. Listes de prisonniers, biographies, photos d’identité, des milliers de pages d’aveux obtenus sous la torture, des pages annotées, commentées, signées, et des ordres d’exécution sont aujourd’hui exposées afin de dénoncer les crimes commis.
La visite s’organise dès lors au fil de quatre longs bâtiments, comprenant trois étages, et disposés en U. La muséographie est volontairement réduite au minimum pour que le visiteur puisse avoir la sensation d’entrer dans le centre de sécurité. Les cellules sont restées dans leur jus avec lit métallique, fers des détenus, chaise, bureau, boîte à munitions américaine dans laquelle les prisonniers déféquaient… Dans un des bâtiments un espace est dédié à l’exposition des photos des milliers de victimes de la torture qui ont perdu la vie dans la prison. Dans un autre bâtiment sont exposés les instruments de torture utilisés par les interrogateurs. Dans la cour du musée, les tombes blanches, rectangulaires, en béton, symbolisent les 14 dernières victimes de la torture retrouvées sur le site.
Informations pratiques du musée du Génocide de Tuol Sleng
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